AUTEUR DE L’ARTICLE
Julie Regnault, ASV chirurgie
Introduction
Voilà plus de 40.000 ans que le chien est devenu le meilleur ami de l’Homme.
L’un et l’autre ont appris à vivre ensemble. Mais la communication reste parfois difficile entre ces deux espèces aux capacités différentes.
Très vite l’être humain a compris les avantages qu’il pouvait retirer des fantastiques qualités de cet animal : ses sens sont plus aiguisés, ses facultés physiques plus adaptées, son endurance est supérieure et sa socialisation est simplifiée par la volonté d’intégration instinctive du chien.
Le chien est utilisé comme chasseur, gardien des troupeaux mais aussi des maisons.
Au cours du temps les chiens ont été dressés pour les compétitions sportives, pour assister les secouristes, les policiers ou les militaires, et pour guider les personnes malvoyantes.
Plus récemment nos 4 pattes ont tissé des liens plus forts avec leur humain et ont réussi à trouver une place importante au sein même de la famille.
I-CAD (société d’identification des carnivores domestiques) a recensé en 2023 en France : 817.480 chiens identifiés.
A ce jour, les races les plus populaires en France sont : le Berger Australien, le Golden Retriever et le Staffordshire Bull Terrier dit Staffie.
En clinique, le stress, la douleur ou la peur d’un milieu inconnu peuvent engendrer un comportement indésirable.
L’Auxiliaire spécialisée vétérinaire (ASV) joue un rôle important dans la compréhension du comportement des animaux. L’approche «Dogfriendly» concerne tous nos patients. Voici quelques conseils pour vous aider à apprivoiser notre fidèle compagnon.
Arrivée de l’animal
Lorsque que le client arrive avec son animal, observez bien leur attitude (aussi bien celle du chien que celle du maître). Vous allez rapidement vous rendre compte si cette boule de poils est plutôt un chien de travail, de sport ou tout simplement « de canapé ». Votre analyse pourra vous aider à appréhender le patient lors de la consultation.
Pour une question de sécurité, tous les chiens doivent être tenus en laisse en salle d’attente, de préférence dans un espace qui leur est dédié.
Si l’animal est agressif (indiqué par le propriétaire) ou qu’il fait partie des chiens de catégorie (Tableau 1), vous pouvez proposer le port d’une muselière (nylon ou Baskerville, figure 1) par sécurité vis-à-vis du personnel soignant, mais également des autres patients ; le port de la muselière est obligatoire dans tous les lieux publics pour les chiens catégorisés (Tableau 2).
Figure 1:
Muselière en nylon
Muselière Baskerville
TABLEAU 1 : LES DIFFERENTES CATEGORIES
Les chiens de catégorie 1 :
Il s’agit des chiens dits « chiens d’attaque ».
- chiens de type American Staffordshire terrier (anciennement Staffordshire terrier), également appelés «pit-bulls»
- chiens de type Mastiff, également appelés «boerbulls»
- chiens de type Tosa
Les chiens de catégorie 2 :
Il s’agit des chiens dits « chiens de garde et de défense ».
- chiens de race American Staffordshire terrier (anciennement Staffordshire terrier) ;
- chiens de race Rottweiller
- chiens de type Rottweiller
- chiens de race Tosa
TABLEAU 2 : REGLES AVEC UN CHIEN DE CATEGORIES 1 ET 2
Obligations | Chiens de catégorie 1 | Chiens de catégorie2 |
Identification | Obligatoire | Obligatoire |
Vaccination contre la rage | Obligatoire | Obligatoire |
Stérilisation | Obligatoire | Non Obligatoire |
Assurance responsabilité civile | Obligatoire | Obligatoire |
Possession d’un permis de détention | Obligatoire | Obligatoire |
Possession d’une attestation d’aptitude | Obligatoire | Obligatoire |
Evaluation comportementale du chien | Obligatoire | Obligatoire |
Restrictions | ||
Acquisition | Interdit | Autorisé |
Cession à titre onéreux ou gratuit | Interdit | Autorisé à condition que le chien soit cédé avec un certificat vétérinaire mentionnant la catégorie du chien |
Importation ou introduction sur le territoire français | Interdit | Autorisé |
Accès aux lieux publics, transports en communs et locaux ouverts au public | Interdit | Autorisé à condition que le chien soit muselé et tenu en laisse par une personne majeure |
Accès à la voie publique et aux parties communes des immeubles collectifs | Autorisé à condition que le chien soit muselé et tenu en laisse par une personne majeure | Autorisé à condition que le chien soit muselé et tenu en laisse par une personne majeure |
Voyage en avion | Interdit | Autorisé (uniquement sur les vols Air France et les vols de fret) |
Observation de l’animal
L’équipe soignante (a minima 2 personnes : ASV et vétérinaire ou 2 ASV) doit avoir une confiance mutuelle et le même esprit de travail. Lorsque nous travaillons auprès des chiens, la sécurité, l’efficacité et l’éthique sont trois objectifs clés de la manipulation.
L’observation des signaux envoyés par le patient est primordiale :
– placement des oreilles
– regard
– positionnement de la queue
– positionnement du dos
– vocalises
Cette étape est très importante, car elle va vous permettre d’obtenir des informations sur l’état de votre patient (stressé, douloureux, peureux, à l’aise, etc…) et donc de l’appréhender différemment : un chiot joueur qui vient pour son vaccin versus un chien de travail avec une fracture du tibia par exemple.
Par exemple, un chien qui se met sur le dos ne veut pas dire qu’il souhaite des câlins. Il peut tout en se couchant, se lécher les babines et avoir la queue basse : signes d’inconfort et /ou de stress.
Un chien muselé et confiant ne veut pas dire qu’il est agressif ; il pourrait simplement être bien éduqué, mais ne pas supporter ses congénères ; il pourrait également s’agir d’un chien de catégorie dont le port de la muselière ne dépend pas du comportement.
Manipulations et contention
Connaître le motif de consultation est primordial car cela va vous permettre d’aborder l’animal sans le blesser. Si vous n’avez pas assisté le vétérinaire lors de la consultation, demandez à ce dernier la raison de sa venue et si le propriétaire a signalé un comportement d’agressivité ou de douleur possible. Lors des manipulations et de la contention, pensez à prendre en compte le motif de la consultation (notamment en cas de douleurs, fractures, etc…).
La première approche avec votre patient doit être douce et ferme couplée à une voix calme et rassurante, et des gestes fluides et précis. Ne forcez pas l’animal à se mettre dans une position inconfortable. Les chiens qui viennent en consultation ne connaissent pas forcément les ordres de base : ASSIS / COUCHER / PAS BOUGER / DONNE LA PATTE.
Votre rôle est d’anticiper vos actes : la préparation de vos produits et des matériels est un gain de temps mais surtout une source de stress en moins pour le chien.
La communication est importante entre l’ASV et le chien, mais aussi au sein de l’équipe soignante. Si vous avez un doute sur votre capacité à prendre en charge un animal, acceptez de laisser la main à votre collègue, ou du moins prévenez votre binôme. Une personne stressée peut transmettre son stress à l’animal et l’acte peut vite devenir difficile.
Lors d’une contention, il faut permettre au vétérinaire de travailler dans de bonnes conditions (pose d’un cathéter, auscultation du cœur, prise de la température, observation des conduits auditifs). Il faut également s’assurer que notre poilu puisse être à l’aise tout en gardant à l’esprit qu’il puisse être surpris ou avoir mal.
Il est important de bien sécuriser la contention pour éviter toute blessure (chien qui essaye de sauter de la table par exemple) ou de morsure.
Pour les grands chiens, vous pouvez rester au sol. Dans cette situation, il est préférable de ne pas s’assoir afin de garder des appuis au sol pour pouvoir s’écarter rapidement si l’animal a un mouvement brusque. Vous pouvez mettre le chien en position assise, entre vos jambes. Cela permet de rassurer le chien contre vous (les gratouilles et les mots doux sont toujours les bienvenus) mais aussi de l’immobiliser avec vos cuisses s’il bouge.
Si le chien est coopératif, laissez-le monter sur la table baissée : pensez à votre dos, c’est tout aussi important.
Pour les petits chiens, utiliser une table ; penser à bloquer les freins de celle-ci.
Comme pour les chats, la pose de carcan est possible : cela permet d’inhiber le chien et de protéger les soignants si l’animal a un geste brusque.
Si le carcan lui fait peur, vous pouvez mettre une lacette autour du nez : vous croisez en haut, puis en bas du museau et vous terminez par un nœud derrière les oreilles. Ce n’est pas une punition, ni uniquement réservé pour un animal agressif, mais cela permet d’éviter les morsures due au stress ou à la douleur.
Si vous mettez ces accessoires de façon ludique et douce, aucune douleur ou stress ajouté ne sont attendus.
Le placement de vos mains est important : il faut toujours garder une main en dessous du cou ; la position de la deuxième main dépend de l’examen à réaliser.
Enfin, lorsque l’examen est terminé, pensez toujours à récompenser votre patient, par un petit gâteau si le propriétaire l’accepte et si l’animal ne doit pas être anesthésié dans la foulée. Sinon, offrez-lui des caresses ou des jeux mis à disposition dans la salle de consultation.
Si vous avez posé un cathéter ou qu’il sort de chirurgie, pensez à mettre un carcan pour éviter que le chien touche ou lèche la zone.
Situations plus difficiles
Certains chiens vont être considérés comme « agressifs », mais leur comportement est le plus souvent secondaire à de la peur, de la douleur ou à de mauvais souvenirs d’un séjour précédent en clinique vétérinaire. Les règles sont les mêmes qu’avec n’importe quel autre chien, en veillant à réaliser des manipulations douces et en limitant le stress de l’animal. Vous devez simplement être plus prudents : choisissez bien votre partenaire lors de la contention, soyez ferme et calme.
Si l’animal est trop dangereux, demandez au vétérinaire s’il est possible de le sédater par voie intra-musculaire ou par voie orale (gabapentine, médétomidine, ou acépromazine par exemple).
Certains soins peuvent être pratiqués en présence du propriétaire, ce qui peut rassurer l’animal.
Une bonne observation permet des manipulations dans de bonnes conditions et donc un bon souvenir pour le chien, mais aussi pour toute l’équipe. Les morsures et les griffures sont trop présentes dans notre métier par manque de temps et ou de connaissances.
Prévention
Le « medical training » est de plus en plus reconnu. Cet entrainement permet d’apprendre au chien à accepter les manipulations et les soins tout en respectant son état émotionnel.
Cette méthode a été créée pour le milieu zoologique pour permettre aux soignants de pouvoir réaliser des soins courants sur les animaux sauvages (pour soigner des plaies ou faire des prises de sang par exemple).
En tant qu’ASV, vous pouvez proposer aux propriétaires de chiens de prendre contact avec un vétérinaire comportementaliste ou un éducateur canin si des difficultés de manipulations sont observées ou pourraient apparaître dans le futur. Ce travail effectué en amont permettra aux propriétaires d’être plus sereins et, à leurs compagnons d’être moins stressés lors de la visite au sein de votre structure.
Pour une ambiance dogfriendly, vous pouvez brancher des prises de phéromones et / ou d’huiles essentielsdans vos chenils et salles de consultations.
Ils existent également en spray : Vaporisez dans la salle de consultation 5-10min avant l’arrivée de l’animalpour accentuer l’effet d’apaisement.
Ces dispositifs peuvent être proposés à vos clients dans leur maison, cage de transport, ou voiture par exemple.
Ils permettent d’apaiser l’animal avant de venir dans votre structure, mais aussi de se familiariser à ses odeurs.
“N’ayez jamais peur de faire ce qui est juste, surtout si le bien-être d’une personne ou d’un animal est en jeu”, Martin Luther King
Bibliographie
- Maud LAFON. Dog friendly : une approche sûre, éthique et efficace pour la prévention des morsures à la clinique [en ligne]. La Dépêche Vétérinaire, 2022 [consulté en septembre 2024]. Disponible sur : https://www.depecheveterinaire.com/dog-friendly-une-approche-sure-ethique-et-efficace-pour-la-prevention-des-morsures-a-la-clinique_679D52853768A566.html
- Laure Bonati. Impact de la douleur sur le comportement des animaux de compagnies
[revue]. Médecine & Chirurgie Animales – Animaux de compagnie / N° 2 – juin 2022 [consulté en juin 2023]. Disponible sur : Impact de la douleur sur le comportement des animaux de compagnie | Laure Bonati
- La société centrale canine et la société I-CAD. Accueil | Centrale Canine
- Les chiens de catégorie 1 et 2 dits « chiens dangereux » | Ministère de l’Agriculture. Les chiens de catégorie 1 et 2 dits « chiens dangereux » | Ministère de l’Agriculture, de la Souveraineté alimentaire et de la Forêt
- Nicolas Tessier, éducateur et comportementaliste canin. Éducateur Canin dans l’Ain et le Rhône – Nicolas Tessier